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 Esther E. Aldisio, « I don't care. »

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AuteurMessage
Esther E. Aldisio

Esther E. Aldisio

[ JOURNALISTE ]
{ ~ La mite ~ }


Messages : 30
Date d'inscription : 27/05/2010
Age : 31


Police record ~
♥ Inventaire de poche ♥:
♥ Petites choses en plus ♥:
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Esther E. Aldisio, « I don't care. » Vide
MessageSujet: Esther E. Aldisio, « I don't care. »   Esther E. Aldisio, « I don't care. » Icon_minitime1Jeu 27 Mai - 9:45

Identity


    Esther E. Aldisio, « I don't care. » Th_fru10
      Prénom(s) : Esther, Eden.
      Nom : Aldisio.
      Surnom : Minette, Princesse, La borgne, Einstein. Ca dépend des gens et de ce qu’ils lui veulent.
      Date de Naissance et âge : 1er Avril (comme c’est comique), âgée de 24 ans.
      Nationalité : Italienne.
      Groupe : Civils.
      Manie, habitude, tic : Elle a tendance à tordre des morceaux de tissus lorsqu’elle ne sait pas quoi faire, qu’elle est hésitante ou autre.
      Profession : Journaliste.


Come on ! Let me look at you…


« Ce n’est pas la lumière qui manque à notre regard, c’est notre regard qui manque de lumière. »
Gustave Thibon.

« Ne détourne pas les yeux ! Avance et regarde ! Vois ! vois ! La réalité du monde que j’essaye de t’inculquer ! Imprime cette horreur au fond de ta rétine ! »

Ses yeux d’un bleu aussi profond que la voûte céleste se détournèrent avec répugnance de cette folie. Le monde était fou. Tout était fou. Et cette même folie commençait à se graver dans son esprit, ses yeux en proie à une terreur à la fois fugace et violente, reflet d’un bleu aussi noir qu’une nuit sans lune où même les étoiles ne parviennent à s’extirper des filaments de nuages qui les masquent au monde.
L’univers accomplissait un nouveau tour dans l’incroyable cycle du temps. La main se levait à nouveau, frappant ce visage à la peau de porcelaine, les ongles délaissant sur leur passage une trace d’où une rose carmin jaillissait, dégoulinant le long du galbe de la joue pour aller s’écraser entre les plis des vêtements colorés.
L’autre œil n’était plus, souvenir faiblard aux abords d’une psyché précaire. Perdu lorsque la folie s’en était emparée, anéanti pour toujours au moment où ce doigt plein de haine y avait apposé sa marque. Son œil droit n’était à présent plus qu’un membre vide et morne de son anatomie, uniquement composé de ce noir profond, ayant abandonné derrière lui sa pupille et étant à présent dans l’incapacité de voir le monde qui l’entourait. Un œil inexistant, un œil que la chirurgie lui avait rendu mais qui ne pouvait pas voir, témoignage de sa fausseté et de ses vicissitudes.

Pour combien de temps encore le monde allait-il tourner à contre temps ? Pour combien de temps les aiguilles remonteraient la pente raide des heures pour s’attacher à lui faire revivre encore et encore les mêmes moments ? Les mêmes instants. Similaires aux anciens et annonciateurs des nouveaux. Elle avait peur que la course du temps ne soit à jamais la même et qu’elle ne parviendrait pas à s’en détacher, à se sortir de ce piège dans lequel elle se débattait jour après jour, les liens se resserrant toujours plus autour de ses poignets fins et faibles.
Les doigts s’abattirent une nouvelle fois, éraflant son nez, glissant le long de ses lèvres rosées. Elle ferma ses paupières, détournant son regard du massacre, se refusant à observer et à conserver à jamais l’image de cette névrose écrite au fer rouge dans l’unique prunelle qu’il lui restait. Elle ne pouvait pas la gâcher.
La main si redoutée s’abattit sur ses cheveux d’un noir aussi enchanteur qu’une obsidienne. Une légère frange qui lui mangeait une partie de front était à présent collée par la sueur d’avoir accompli un effort trop dur pour lui. Chaque fibre de son être suintait la peur et l’angoisse. Elle guettait, dans un dernier soubresaut d’inquiétude, le prochain coup, la prochaine slave de douleur, se débattant quelques fois, constatant avec crainte que ses forces n’étaient plus qu’un vague souvenir.
Son cou fin fut pris d’assaut par deux mains qui s’unirent pour serrer. Encore. Toujours plus. Son visage aux traits fins dû au manque de nourriture ne reflétait plus que la persuasion que la fin était proche.

« Pourquoi ? Pourquoi ? »

Et ces questions sonnaient comme un cri de détresse émanant de la bouche de cette femme. Elle regardait sa fille. Attendait ses réactions. Espérait. Criait. Dévorait du regard chaque courbe de son corps aux protubérances encore inexistantes.
Malgré son jeune âge, elle sentait qu’elle ne serait jamais grande ni complètement féminine. Petite de taille, elle lui pressentait aisément un léger mètre soixante, si ce n’est moins. Les muscles étaient peu proéminents, malgré une stature d’athlète. Elle l’avait habituée à courir, à souffrir, à recevoir des coups.
Amaigri par les mauvais traitements qu’elle lui dispensait, elle n’était plus que l’ombre d’elle-même. Maigre. Trop. Esther ressemblait à ces cadavres délaissés sur les bords des routes en temps de guerre. Et elle resterait avec cette allure pour le restant de ses jours. Mais le monde était souillé. C’était pour son bien !

Elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver une attirance, une envie de l’embrasser, de goûter à ses lèvres qui lui faisaient tant envie. Il se dégageait d’elle un charme qu’elle ne s’expliquait pas. Qu’elle ne comprenait pas. Qu’elle ne voulait pas comprendre. Cette enfant était une malédiction et, pourtant, tout son corps dégageait l’envie et le désir. Elle la trouvait belle malgré les blessures qu’elle lui infligeait, elle voulait qu’elle l’aime malgré tous les maux dont elle était responsable.
Elle se sentait avalée par ses yeux pareils au ciel nocturne, elle voulait que cette lune qu’elle discernait en leur cœur n’appartienne qu’à elle. Elle voulait la posséder. Et ce sentiment la dégoûtait.
Les longs bras fins de sa fille partirent en quête d’air, griffant son visage. Ses doigts, à elle, étaient longs, fins, et aussi pâles que la mort. Elle se pencha, déposant un baiser sur son œil invalide qu’Esther s’acharnait à ne pas cacher. Elle lui rappelait à chaque minute, à chaque heure, l’horreur de sa folie.

Pour parfaire à son image féminine, elle l’habillait avec des vêtements allant de pair avec son allure. Colorés. Les nombreux plis aux reflets irisés étaient couverts du sang qui s’écoulait de ses blessures. Elle sentait l’hémoglobine, s’en écœurait.
Sa pression sur son cou se relâcha légèrement tandis qu’elle tentait de reprendre contenance. Avait-elle face à elle une enfant ou une adulte ? Une enfant. Au regard déjà torturé des adultes. L’étrangeté de la chose lui faisait perdre la tête. L’une de ses mains se détacha de ce cou pour aller errer sur cette poitrine plate qui ne prendrait que peu de volume avec le temps.

« C’est pour ton bien, tu le sais ? »

Oui, elle le savait. Du moins, elle le pressentait. Le reflet du monde n’était qu’une pâle copie de ce qu’elle discernait. Sa mère, apostolique, n’avait pour seule envie que de la voir pure et dénuée de péchés. Etait-ce un mal ou un bien ?
Peu à peu, l’air retrouva le chemin de ses poumons, son teint pâle reprit des couleurs. Quelques rougeurs, preuves bien incertaines que la vie habitait encore ce corps, vinrent agrémenter la pâleur de sa peau. Esther était de ceux dont le soleil n’est pas un bienfait. Elle ne bronzait pas. Ne prenait pas de couleurs, demeurant aussi blanche que la neige.
Bientôt, elle put se relever, se tenir sur ses deux jambes, retrouver sa condition de bipède qu’elle affectionnait tant. Sa physionomie rongée par la folie d’une mère destructrice était pauvre, faiblarde. Pourtant, elle savait que ses jambes pouvaient la soutenir pour plusieurs heures de course, que son ventre qui criait sa faim et sa soif pouvait supporter pire, que les bleus qui parsemaient son corps, signe de l’erreur et du péché, étaient acceptés sans hurlements.
Ses membres endoloris la portèrent jusqu’au canapé aux bras usés et râpés. Il sentait l’alcool et la cigarette qui prirent d’assaut son nez fin. Son visage d’ange se tourna vers la femme qui se tenait prostrée dans un coin de la pièce. Elle aurait aimé la rassurer, lui dire que ce n’était pas grave, qu’elle comprenait et qu’il l’acceptait, mais les mots refusèrent de sortir de sa bouche.
Pourtant, sa voix valait tous les trésors du monde. Elle rassurait sa mère, suave, légèrement plus aigue que la moyenne. Avec le temps, les sonorités qui s’échappaient de sa bouche deviendraient légèrement plus graves, mais toujours aussi envoûtantes. Néanmoins, elle se doutait que si elle parlait, les coups seraient plus meurtriers. Si sa voix plaisait, elle dégoûtait aussi. Parce qu’elle réveillait chez sa mère le désir de le posséder.
Elle était trop jeune. Son visage juvénile le resterait pour quelques temps encore. Ses traits enfantins la poursuivraient dans l’adolescence, lui enlevant peu à peu des années à son compteur. A treize ans, il en paraîtrait dix. Mais le temps la forcerait à grandir.

A ses oreilles, se dresseraient bientôt avec toute la vanité des vieux souvenirs encore trop présents, deux piercings le long du cartilage de son oreille gauche tandis que d’autre viendraient simplement compléter le lobe de l’oreille, à raison de quatre à gauche et cinq à droite. Une touche d’excentricité pour masquer sa vision déformée de l’univers.
Un tatouage le long de son omoplate gauche, représentant un lys, rappellerait les années passées avec sa mère. Le lys, signe de la pureté et de ce désir inassouvi et dévastateur qui avait ravagé ce qui aurait pu représenter un foyer.
Dans son regard, seulement la pitié et l’indifférence. Parfois la joie, parce qu’on n’est jamais totalement malheureux. Mais ce bonheur serait perverti par une folie contagieuse et indomptable.
Ses lèvres réapprendraient à sourire, le rire traverserait son corps de temps à autre et elle passerait parfois pour un joyeux luron un peu dément. Et pour cause ! Elle le serait. Elle se moquerait. Elle ne ressentirait plus rien, ne verrait plus rien, n’entendrait plus rien, incapable d’éprouver quoi que ce soit pour les autres. Dans l’avenir, il n’y aurait plus les coups et les blessures, seulement quelques cicatrices et cet œil vide pour conserver quelques traces du passé.
Dans l’avenir. Maintenant. Elle garderait pourtant cette peur irascible et cette envie de s’enfuir, bien enfouies au fond d’elle. Elle s’attacherait à sa mélancolie, la noierait sous des drogues.

Pauvre arlequine au sourire spleenétique et moqueur.

Wanna' understand you, my friend...


La sainteté, la virginité, la bonté… Des pauvres vagues à l’âme tout juste bons à entretenir les douces chimères de fillettes trop innocentes pour saisir la réelle valeur des choses.
La religion, c’est l’opium du peuple.
C’est ce à quoi il se raccroche dans le vain espoir de sustenter un peu plus longtemps à ses besoins, dans le ridicule désir de pouvoir demeurer un peu plus sur Terre pour qu’il lui soit permis d’accéder au Paradis, au Bon et Miséricordieux, à celui qui pardonnera tous leurs maux, tous leurs mots, tous leurs péchés, toutes les horreurs de leur vie humaine. Une hypocrisie lourde de conséquences, puisque chacun a allègrement baisé dans tous les recoins dans cette planète, chacun s’est abreuvé de l’essence de l’autre, trompant, volant, jouissant, hurlant, griffant, détruisant chaque ruelle, apposant sa marque sur chaque dalle.

Ah, elle est belle la vie humaine !

Alors mieux vaut la regarder de loin, ne pas s’en approcher, demeurer aux abords de la psyché branlante et fragile de tous ces fous de bas étages, attendant d’être à son tour frappé par cette vague de démence, prêt à se laisser emporter sur ses flots tumultueux, prêt à vendre corps et âme pour quelques piécettes bien innocentes. Après tout, c’était tellement plus amusant de regarder les autres se lasser du fardeau que leur imposait le monde. Leurs épaules s’affaissaient délicieusement sous le poids de regrets trop lourds à porter, leurs échines se pliaient dangereusement, accusant le coup de la culpabilité, leurs os se brisaient un à un, brindilles trop faibles pour supporter ce déchaînement de fureur et de pleurs. Deux choix s’offraient alors à eux : accepter toutes ses erreurs et continuer à vivre une vie de débauche et de dérision, ou rejeter toute cette ivresse avec mépris et sombrer dans la plus exquise des folies.
Esther avait fait le choix de se contenter de regarder, ne se mêlant pas au monde, le regard constamment perdu, incapable de discerner le réel de l’imaginaire, se mélangeant entre ce qu’elle croyait être et ce qui était réellement. Sa réalité lui était propre, comme à chaque d’entre nous. Nul n’envisage la réalité de la même façon. Un fou vous dira que le monde est rose tandis qu’un sain d’esprit s’amusera à décrire le kaléidoscope de couleur que son regard non aliéné lui permet de percevoir, incapable de se rendre compte de lui-même de la simple perversion que ces ébauches de pastels et de vert criard pouvaient exercer sur lui.

Rien n’a d’intérêt.

Certains en ont très vite conclu qu’Esther n’en avait tout simplement rien à faire de ce qui l’entourait. Qu’elle préférait de loin les simples plaisirs charnels à ceux d’une relation à la fois tendre et amoureuse.
Et ils n’avaient pas tout à fait tort.
Les émotions ? « ‘Connaît pas ». Tout au mieux parvient-elle à les imiter, à les déformer pour en renvoyer de pâles reflets aux autres, pour les laisser miroiter qu’elle n’est pas tout à fait vide et qu’il y a encore de quoi se nourrir, pour leur faire croire qu’ils sont tout puissants alors qu’elle les détraque dans ses rêves, qu’elle détraque leur existence, leur vie.
Pourtant, si l’on prenait le temps d’aller explorer la cervelle de cette demoiselle, on y rencontrerait ni la colère qu’elle tente de déchaîner sur ses camarades de temps à autres, ni la tendresse qu’elle semble éprouver pour ses amis, ni l’amitié, encore moins l’amour. Pas même de quoi alimenter un câble en énergie. Serait-elle faite de fer et non de chair que l’on pourrait se persuader d’avoir face à soi un robot incapable d’éprouver le moindre sentiment.
Mais après tout, à quoi bon ? C’était comme regarder la vie à travers une feuille pâle et usée, comme contempler un paysage abîmé par les aspérités du temps, comme se délecter d’une nourriture sans saveurs et prendre du plaisir à sombrer dans la décadence. Seuls le sexe et la drogue la sortent de cette torpeur moite dans laquelle elle s’enfonce un peu plus chaque jour, seuls eux sont capables de réveiller chez elle un quelconque attrait, une quelconque lueur d’intérêt. Elle se noierait dans sa merde qu’elle n’y prêterait pas attention. Bien souvent elle s’était attirée des ennuis pour ne pas avoir su interpréter correctement l’avis des autres, pour ne pas avoir su comprendre les émotions.
Avec le temps, on les apprend. Comme un livre. A retenir par cœur, avec certains passages à surligner de couleurs vives pour marquer leur dangerosité. Mais jamais on ne ressent les fragrances de la solitude, on ne comprend pas, on ne voit pas, on n’entend pas. On ne se mêle pas à la vie, préférant rester sur le côté et laisser les affreuses aiguilles du Temps et de toute sa grouillante postérité les Heures, les Minutes et les Secondes frapper les autres.

Tout est vide. Tout est schizoïdique.

L’avantage, c’est qu’elle est encore capable de discerner les bienfaits de l’adrénaline, de se secouer pour s’éloigner de sa torpeur. Le sexe. Dangereux. Violent. Et l’inceste, surtout. Le goût pour l’interdit et le péché, la souillure et la luxure. C’était comme défier l’autorité suprême de l’être divin, comme s’amuser avec lui, comme croire que tout était possible, comme violer le sacré, comme pénétrer au cœur du tourment, comme guigandélirer avec le Chapelier, comme s’éclater sur une musique pourrie droguée jusqu’au bout des ongles.
Lorsqu’on pénètre dans le jardin interdit de l’Eden, on n’en ressort plus et c’est tant mieux. Quoi de mieux que de commettre l’ultime sacrilège, quoi de mieux que de s’exposer aux foudres d’un prêtre enorgueilli par sa sagesse et sa croyance en Dieu ? Faire couler la drogue dans ses veines pour éveiller le frisson, pour prendre part à la vie, pour se rendre compte qu’il y a autre chose que le vide immense qui semble la séparer de la réalité. C’est se tirer pendant quelques heures de cette prison d’ennui et d’oubli où elle croupit à longueur de temps, c’est envisager l’idée qu’elle n’est pas si détraquée, pas si obsolète, pas si inutile.

Parce qu’elle est inutile, la demoiselle. A quoi pourrait-elle bien servir ? Mis à part son Q.I largement supérieur à la moyenne, elle n'a rien d'extraordinaire. Elle se fiche de tout que ce soit de ses amis ou de sa santé, elle n’est ni loyale ni généreuse, pas ingrate mais pas non plus extrêmement polie. Vous n’êtes pas intéressants alors à quoi bon ?

Demandez-lui à quoi elle ressemble et Esther vous répondra qu’elle n’en sait rien. Tout au plus elle n’a de sa personne qu’une vision globale regroupant ses deux yeux, ses deux bras, ses deux jambes et son cerveau. Parce que le monde n’a pas d’intérêt, elle ne souffre pas de la solitude, elle s’en fiche. Tout lui est d’une indifférence la plus totale. Brute et corrosive. Elle ne juge pas les gens, elle ne prend, bien souvent, pas la peine de les connaître.
Un peu de sexe, un peu de drogue suffisent à la faire planer encore plus haut qu’elle ne l’est déjà.

Rien n’a d’intérêt. Je m’en fous du monde, pour peu qu’il me laisse tranquille.

And me? And me?


    Ce qu'il pense précisement de la Mafia
    : Esther déteste la mafia. En tant que journaliste, elle sait que les informations qu’elle détient peuvent être précieuses et elle compte bien les utiliser pour détruire la mafia de l’intérieur, pousser les différentes familles à se méfier des autres, déclencher des conflits, etc…
    A t-il déjà eu affaire à la Mafia : Elle y a déjà eu affaire lors du coup d’état. Ely, sa seule amie, s’est retrouvée prise entre deux feux et en est morte. Depuis, elle ne rêve que de l’anéantissement de ceux qui sont responsables de sa mort.


Tell me who you are...


« Quant à moi, maintenant, j'ai fermé mon âme. Je ne dis plus à personne ce que je crois, ce que je pense et ce que j'aime. Me sachant condamné à l'horrible solitude, je regarde les choses, sans jamais émettre mon avis. Que m'importent les opinions, les querelles, les plaisirs, les croyances ! Ne pouvant rien partager avec personne, je me suis désintéressé de tout. Ma pensée, invisible, demeure inexplorée. J'ai des phrases banales pour répondre aux interrogations de chaque jour, et un sourire qui dit : "Oui", quand je ne veux même pas prendre la peine de parler.
Me comprends-tu ? »

Solitude, Maupassant.

.


La neige tombait à gros flocons du ciel le long de l’avenue qu’elle remontait péniblement, par la seule force de sa volonté. Son visage était à demi emmitouflé sous une pauvre écharpe, empêchant les volutes de vapeurs de s’échapper de sa bouche. Mais son nez rouge et meurtri par cette froideur hivernale témoignait de sa condition. Il ne faisait pas bon de traîner dans le quartier lorsque la nuit était tombée et les étoiles, déjà haut dans le ciel, lui hurlaient de rentrer s’abriter le plus vite possible… De la brise glaciale et des prédateurs qui rodaient lorsque le noir envahissait chaque parcelle du terrain qu’elle habitait avec sa mère.
Elle savait très bien qu’elle n’aurait jamais dû se trouver là, et elle-même aurait préféré être au chaud devant un ordinateur ou un quelconque jeu vidéo, comme n’importe quel enfant ayant des parents possédant les moyens de payer ces objets, mais, outre le fait qu’elle ne verrait probablement jamais cette technologie, sa mère l’avait instamment priée en début d’après-midi d’aller « faire ses preuves » et de se nettoyer de toutes les impuretés qui la souillaient au quotidien, considérant qu’elle passait trop de temps enfermée au milieu de livres qu’elle feuilletait à longueur de journée, et que le temps était venu pour elle qu’elle aille voir qu’il y avait aussi un « extérieur ». Malgré son jeune âge, elle ne rechignait pas à la laisser sortir seule, préférant lui faire accepter la dure réalité de force plutôt que de s’armer de gants en laine et d’y aller en douceur. Certaine mère l'aurait considérée comme imprudente, mais elle n'était pas de cet avis. Un enfant a besoin d'être autonome. Quelle idée saugrenue !
C’était une nouvelle maison. Un nouveau quartier. De nouveaux voisins. Un nouveau boulanger. De nouveaux sourires. Tout avait changé, son monde était différent. Elle avait du mal à s’acclimater à cette nouvelle vie que sa génitrice, si heureuse de leur déménagement. D’après elle, leur ancienne ville ne convenait à personne et, même si Esther avait eu un ou deux amis chers, ils ne comptaient pas assez pour lui manquer. Elle espérait qu’avec le temps, l’oubli ferait son œuvre et viendrait effacer toute trace de tristesse ou d’amertume.
Un désir d’adulte, en somme. Des souhaits égoïstes. Mais comme elle ne s’était toujours pas plaint, sa mère en avait conclu qu’elle était parfaitement heureuse et que rien à présent ne viendrait perturber leur petit nid d’amour.
Elle savait pourtant que, contrairement à ce qu’on voulait lui faire croire, la vie n’était pas aussi douce et paisible. Elle voyait sa mère, constamment aux aguets, sombrer peu à peu dans une folie paranoïaque. Ses désirs de pureté devenaient plus violents. Plus sauvages. Sa main devenait plus ferme, plus vive. Ses longs doigts pâles étaient toujours tentés de se serrer autour de son cou pour renier à tout jamais cette erreur. Une erreur. Esther n’aurait jamais dû voir le jour et malgré l’indolence de sa mère sur la question, elle sentait, dans son âme d’enfant, toute l’horreur qu’elle éprouvait en la voyant ; et les blessures qui meurtrissaient son corps apportaient un nouvel élément à ce puzzle encore incomplet.

A cette pensée, un frisson se répandit dans tout son corps, allant heurter son cœur et dérangeant son cerveau. Ce n’était ni le bon moment ni le bon endroit pour aborder les sujets qui fâchent. Les yeux mi-clos, elle continua d’avancer, tentant de se faire la plus petite possible et d’éviter d’avoir à tomber sur un ou deux adolescents à l’air revêche qui n’auraient sans doute pas envie de lui lancer un gentil sourire et un « bonne soirée ! » poli.
L’appartement n’était plus très loin. Carré, petit, miteux… Esther était de ceux que ceux qui jouissaient d’une vie de prestige appelaient avec beaucoup d’aigreur un « gosse de pauvre » et on l’avait prévenue sur les éventuels voyous qui traînaient dans les environs prêts à la détrousser malgré son manque évident d'argent, voir à aller plus loin si leur libido était trop prononcée. Mais à priori, l’avenue était calme. La neige occultait tous les bruits, et même le silence pesant qui aurait dû régner à cette heure de la nuit lui parut bien lointain. Elle se trouvait dans un tout autre univers, blanc, limpide, dépourvu d’imperfections. Une petite bulle joyeuse et fraîche. Si la nuit ne l’avait pas autant terrorisée, probablement qu’Esther en aurait profité pour rester un peu plus longtemps dehors, à profiter de cet instant de solitude si rare et si précieux.
Mais elle n’avait pas le temps. La course des aiguilles jouait contre elle. A tout moment, elle pouvait se faire attaquer. Prudente. Toujours.

Son pas s’accéléra alors que derrière elle retentissait un nouveau bruit, pareil au frottement d’un vêtement contre la neige. Son cœur manqua un battement tandis qu’elle se pressait encore, ignorant du mieux qu’elle le pouvait cette déformation dans l’univers blanc. Ne pas se retourner, marcher encore. Au fur et à mesure qu’elle avançait, le bruit se faisait plus net. Plus précis. Elle se dépêcha.
Elle apercevait les contours de l’immeuble. Ses yeux étaient rivés vers cet unique endroit. Elle en décelait chaque craquelure, chaque petite imperfection si caractéristique. Si elle parvenait à l’atteindre, elle serait saine et sauve. Elle ne comprenait pas cette peur irascible qui la saisissait tout à coup. C’était comme si son instinct lui hurlait le danger imminent.
Elle jeta un coup d’œil furtif derrière lui. Un coup d’œil de trop. Tout devint noir.

.


Le monde s’effondra une nouvelle fois dans un dernier soubresaut. La terre trembla, le sol se déroba sous ses pieds tandis que les coups pleuvaient au-dessus de sa tête et que les cris hystériques s’abattaient sans ménagements sur ses oreilles. Elle l’entendait. Elle la sentait. Elle voyait ce que le monde avait fait d’elle.
Ses yeux s’ouvrirent brusquement. C’était elle. A la douleur au niveau de son crâne, elle comprit qu’elle l’avait assommée alors qu’elle remontait l’avenue. Elle était sortie et elle l’avait suivie, abattant son poing sur son être pour la ramener de force à la maison. Elle avait l’habitude des coups, elle avait l’habitude des griffures et des morsures… Mais cette fois, c’était différent. Elle sentait un changement et elle pressentait une fin abominable.
« Pure ». Il n’y avait que ce mot qui se projetait inlassablement le long des murs, rebondissant, courant, revenant vers leur émissaire. Il envahissait tout l’espace, s’imposait, grossissait jour après jour, plus important qu’auparavant. Vaniteux et narcissique, il se faufilait partout où il le pouvait, se proclamant sans élection roi d’un monde psychédélique. Persuadé d’être le meilleur, le plus beau, il s’était emparé des rênes d’un esprit trop faible pour supporter l’horreur d’une naissance fortuite.
Une erreur. Un viol. Cette enfant était le fruit de son péché, le souvenir de la douleur. Elle n’aurait jamais dû se trouver là, elle n’aurait pas dû être de ce monde. Elle ne méritait pas d’exister… Alors elle devait la laver de toutes les marques de souillure qu’elle lui avait transmises. Elle devait être plus pure qu’elle, moins sale.
Les yeux écarquillés par la rage, elle griffait cette peau qui n’était jamais assez blanche, elle se dégoûtait de ces yeux trop bleus, trop inquisiteurs. Elle plongeait son regard dans son âme, cherchant d’infimes traces de saleté… Et les larmes dégringolaient le long de ses joues, suivant le galbe rougi par la honte et la satisfaction pour aller se répandre une nouvelle fois sur les planches qui constituaient le sol. Cette répugnante patine de misère les écœurait tous les deux, mais, plus que tout, cette femme sentait s’insinuer en elle la douce graine de la démence.

A travers les barreaux symboliques séparant les deux mondes, la grande route du château, Esther observait celle qu’elle ne reconnaissait plus. Elle ne comprenait pas. Son jeune âge ne lui permettait pas de saisir toutes les subtilités du monde de la folie, habité par des déités impalpables et extravagantes.
Elle se contentait d’accepter, de soutenir sa mère dans son incessante recherche. Elle savait que le temps ferait son œuvre, que les jours, les heures, les minutes et les secondes finiraient par chasser les maux pour un moment de tranquillité. Les coups ne seraient plus qu’un passé encore trop vif pour totalement l’oublier. Un passé qui reviendrait avec force dès que sa mère en ressentirait le besoin. Elle ne se plaindrait pas.

« Tu n’aurais pas dû naître ! »

Elle ferma les yeux et se recroquevilla, cherchant à se protéger des blessures et de la peur. Au fond d’elle, elle sentait l’angoisse. Elle voyait ses beaux yeux languissants, d’une couleur ténébreuse et indécise, ressemblant à des violettes, chargés encore des lourds pleurs de l’orage. Elle la regardait avec ses yeux inconsolablement navrés, d’où s’écoulait une insidieuse ivresse. Ses belles manières insinuantes tentaient de la faire basculer, à son tour, dans le monde de la folie. Elle s’accrocha à son propre corps pour ne pas basculer. En équilibre précaire sur un fil à peine tangible, elle gardait les yeux rivés sur les flots tumultueux de l’inconscience.
Une main aux doigts fermes se saisit de ses cheveux avec violence, l’obligeant à relever la tête. Elle ne comprit pas le danger imminent. La scène lui paraissait trop irréelle pour être crédible. Ce moment appartenait aux rêves et aux cauchemars, pas à la réalité. Un doigt, un seul, suffit à faire pénétrer en elle une douleur qui surpassait toutes les autres.

« Et ces yeux, sans cesse à m’observer ! »

Dans un ultime cri, elle déchaîna toute sa rage sur son œil droit qui, bientôt, ne fut plus qu’une effusion incandescente de souffrance. Pour la première fois, elle hurla. Elle avait l’impression que son œil n’était plus qu’un horrible trou béant par lequel pouvait entrer toute la folie et la haine. Son hurlement eut pour effet de décupler la colère, de la rendre plus vivace, plus pénétrante.

« Ne crie pas ! Accepte ! »

Malgré les injonctions, elle ne pouvait s’empêcher de laisser sa voix jaillir hors de ses lèvres. Folle. Elle était folle. Et sa folie avait avalé son œil, dans un ultime bâillement.

.


Ses yeux s’ouvrirent péniblement. Ses yeux ? Non. Un seul seulement. Le gauche. Celui qui n’avait pas encore été mangé par la démence. Sur l’autre se trouvait un épais bandage qui lui dévorait une partie du visage.
Autour d’elle, le monde était devenu d’un blanc pâle, un peu comme la mort. Le plafond était couvert de rainures noires qui contrastaient avec l’immaculé de la pièce dans laquelle elle se trouvait. Au-dessus d’elle, elle entendait des murmures qui allaient et venaient, étrange mélopée qu’elle ne saisissait pas. Pour une fois, elle se sentait calme. Elle n’avait pas peur. L’étrangeté de sa situation ne la dérangeait pas. Elle aurait même voulu ne jamais se réveiller, conserver pour l’éternité cet état à demi comateux qui l’enivrait d’une fraîcheur nouvelle, d’une sérénité et d’une quiétude qu’elle avait guettées tout au long de sa courte vie sans jamais les trouver.
Elle s’agita légèrement, ses sensations lui revenant peu à peu. Cet infime mouvement eut pour conséquence de faire taire les murmures et elle sentit que toute l’attention était, à présent, tournée vers elle. Qui étaient-ils ? Des anges ? Etait-il mort ? Vaguement, elle sentait qu’elle espérait que ce soit le cas, mais ses membres étaient trop douloureux pour que la réalité fut aussi douce. C’était trop beau. Trop parfait. Trop blanc.
Une main fraîche se déposa sur son front tandis qu’une autre palpait différents endroits de son corps. Les murmures étaient revenus, plus graves et plus intenses. Elle sentait l’inquiétude d’une autre personne à proximité d’elle, une inquiétude pourtant trop dévastatrice. Très vite, elle comprit qu’il s’agissait de sa mère. Cette révélation lui arracha un hoquet de terreur. Elle ne voulait pas rester à côté d’elle. Elle dévorerait le seul œil qu’il lui restait ! Qu’elle s’en aille ! Qu’elle s’en aille ! Un poids. Nouveau murmure.

« Ne bouge pas. »

Un ordre à demi étouffé par une douceur inhabituelle. Elle aimait sa voix, bien qu’elle ne connaisse pas encore son visage.

« Esther ! Esther ! Je suis désolée ! Je suis tellement désolée ! »

Ce son. Brusque. Elle le détestait. Son corps réagit avant même que le cerveau ne dicte les ordres nécessaires. C’était instinctif et, malgré la force qui s’appliquait à la maintenir tranquille, elle se recroquevilla sur elle-même, guettant avec angoisse les coups, les mains aux longs doigts de neige, et les hurlements.
Pourtant, rien ne vint. La force avait disparu et s’évertuait à présent à faire sortir sa mère de la pièce. Elle savait qu’elle luttait de toutes ses forces pour rester à ses côtés. Peu à peu, elle commençait à discerner une autre fin possible que celle qu’elle avait jusqu’alors imaginée. Elle avait toujours cru qu’elle finirait par mourir des blessures qu’elle lui infligeait… Mais la force pouvait être son sauveur.
Blanc… Un hôpital ? Comme elle l’espérait ! Elle voulait qu’on voie les marques. Elle voulait qu’on voie la souffrance. Elle voulait qu’on la sorte de ce piège qui se resserrait peu à peu sur elle, étau dont elle ne parvenait pas à s’extirper. Elle désirait que le monde tourne son lourd regard vers elle et exprime tous les remords d’une personne qui a mal fait son travail. Si Dieu existait, si une quelconque déité habitait ce ciel chargé d’horreurs, qu’il l’entende !

D’un coup, elle se reprit. C’était égoïste de sa part de désirer ce genre de choses. La honte l’assaillit alors qu’elle s’imaginait sa mère, seule, dans cet appartement miteux.

« … Ma… »

La dernière syllabe resta bloquée dans sa gorge, incapable de s’échapper pour former le mot complet. Depuis combien de temps ne l’avait-elle plus appelée ainsi ? Un mois ? Deux ? Six ? Un an ? Les sons refusaient de s’agencer les uns aux autres, refusaient de former cette sonorité si attendue et si délectable.
Quand elle était petite, elle s’amusait à la suivre en l’appelant, petit oisillon suivant le grand, émerveillée par sa grandeur d’esprit et sa force. Mais le grand oisillon avait changé. Au fil des jours, elle l’avait vue sombrer, se laissant ballotter par les flots tumultueux d’une névrose en pleine croissance. Son esprit avait été grignoté par un mal contre lequel elle ne pouvait lutter. Les souvenirs, les pensées, tout s’entremêlaient et se resserraient, prison de mots et de sensations impalpable et pourtant si dure. « Ne t’en vas pas ! ». Les larmes n’auraient servi à rien. Elle s’était refusée à s’abaisser à ça. La folie en aurait été trop heureuse et elle aurait redoublé d’efforts pour s’emparer du peu de conscience qu’il restait encore à sa génitrice. Qui était-elle, aujourd’hui ? Une coquille vide, semblable à l’épave d’un bateau, délaissée par les autres, et abandonnée à la violente rigueur du Temps et à son incroyable postérité. Secondes, Minutes, Heures, Jours, tout prenait son sens, tout s’agençait parfaitement, comme tout se détériorait. C’était paradoxal. C’était un nouvel univers psychédélique dans lequel elle n’aurait pas pu la rattraper. « Ne t’en vas pas ! ».
Elle aurait voulu lui hurler de ne pas se laisser aller, mais sa voix ne portait pas assez loin, ses cris n’étaient pas assez puissants… Et puis les coups et les blessures avaient fini par la faire taire, par lui façonner une geôle à elle aussi. Elle y avait enfermé tous ses espoirs. Elle y avait délaissé tout ce qui la composait autrefois pour ne garder que l’horrible réalité du présent. Le passé et le futur n’étaient rien. Le passé était trop lointain pour qu’elle puisse le saisir et l’amener à elle, et le futur était pareil au présent, en pire et en plus effrayant. Les monstres sous le lit, les ombres dans les placards, les fantômes, les sorcières, les loups-garous, toutes les légendes et toutes les fables de ce monde étaient représentées par sa mère. Elle lui faisait peur. Et pourtant elle l’aimait. « Ne t’en vas pas ! ».

« … Ma… »

Son œil unique se plissa. Ses lèvres tremblèrent tandis qu’elle s’enfonçait plus profondément dans les draps blancs, échappant à cette fragile vision du médecin chassant sa mère. Elle souhaitait s’endormir et ne plus se réveiller. Partir pour ne pas avoir à s’opposer à ce départ forcé de sa mère. Elle savait qu’elle attendait qu’elle réagisse, qu’elle quémande sa présence, qu’elle pleure en la réclamant. Mais elle ne voulait pas la voir. Elle ne voulait pas qu’elle mange son autre œil. Elle ne voulait pas qu’un nouvel accès de fureur la prive à tout jamais de sa vue. Même si la vision qu’elle avait du monde n’était pas des plus belles, même si les monstres seraient toujours là à la guetter, elle ne voulait pas perdre cette chose si précieuse. Alors il lui fallait dormir. Dormir et ne plus se réveiller.
Mais l’homme l’en empêcha.

« Esther ? Tu m’entends ? »

Un grognement étouffé accueillit sa piètre prestation, énième tentative pour essayer de maintenir la fillette au bord de sa conscience, pour l’empêcher de retourner se lamenter dans les bras de Morphée.

« Je sais que tu veux dormir, mais c’est important. Ecoute-moi, d’accord ? »

Hochement de tête. Qu’il parle et qu’il la laisse dormir.

« A partir de demain, ta mère ne viendra plus. Elle n’a plus l’autorisation de te voir. Tu comprends ce que ça signifie ? »

Le choc de la nouvelle fut violent. Elle se réveilla, se redressa d’un bond sur son lit, mais demeura silencieuse. Son œil se tourna vers le médecin qui leva doucement une main dans l’espoir, probablement, de calmer son inquiétude par une caresse. Mais il n’y parvint pas. Avant même qu’il ne se soit approché, Esther s’était à nouveau recroquevillée sur son lit pour échapper à ces doigts.

« Tu n’as plus rien à craindre. »

Plus rien à craindre… Mais plus de mère non plus. Devait-elle vraiment s’en réjouir ? Elle n’eut pas le temps de répondre à cette question. Morphée s’empara d’elle et l’attira une nouvelle fois dans son étreinte.

.


Le blanc écœurant d’une chambre d’hôpital fut son refuge pour les quelques mois qui suivirent. Le sang avait étalé ses appas, épongé par des médecins avides de savoir et remplis d’un orgueil qui tempérait la froideur de cette austérité soudaine. Elle, Esther, le produit avarié né d’un siècle vaurien, s’enlaidissait dans le fade reflet de cette chambre pleine de moisissures et de vices.
Les médecins et les infirmières étaient aussi pourris que le reste de l’humanité. Baisant encore et encore dans les recoins de cet hôpital miteux, s’enfermant dans les placards, inconscients de la jeune Esther qui entendait leurs gémissements de plaisir et enfonçait sa tête dans son oreiller lorsque surgissait le moment de l’extase. Tout lui donnait envie de vomir. L’hypocrisie humaine lui sautait à la figure, plantant ses griffes dans sa chair, s’insinuant par le réseau veineux qui parcourait son corps et se logeant dans son cerveau.
Pourtant, ces quelques mois sonnèrent comme une libération. Un répit. Une pause. La folie de sa mère ne l’atteignait pas ici, ne pouvait plus l’atteindre. Elle pouvait se maintenir en bordure de cette vague dévastatrice qui n’attendait que son retour pour la faucher à nouveau. Elle redoutait l’instant où il lui faudrait quitter cet endroit, malgré les sourires condescendants, et les infirmières qui la droguaient de leur compassion et leur gentillesse avant de s’envoyer en l’air dans les chambres voisines.
Elle redoutait sa nouvelle famille. Elle redoutait le monde et son immensité qui l’avalerait aussi vite qu’il avait avalé sa mère. Et plus sa peur grandissait, plus la haine la gagnait. Elle haïssait les gens, le personnel de l’hôpital. Sa personnalité se transformait, la rendant moins souriante et moins sociable. Certains mettaient ça sur le compte du choc psychologique, d’autres sur celui de la perte de sa mère. Nul ne comprenait que chacun était responsable de ses sautes d’humeur. Mais, malgré tout, elle ne voulait pas quitter cet endroit.

Elle se plaisait ici.

.


Des ombres torrentielles, rouges et visqueuses, se poursuivaient, haletant et glissant, dans les corridors infinis du ciel violet et zébré d'éclairs... Phantasmes sans forme, dessins d'un kaléidoscope vampirique... Forêt de chênes monstrueusement nourris dont les racines en forme de serpent se tordaient, aspiraient d'innommables sucs dans la terre grouillante de démons cannibales... Tentacules en forme de tertres, nés d'un noyau souterrain de pourriture perverse... Eclairs de folie sur des murs couverts de lierre malsain... Galeries démoniaques éclairées par une végétation putride...
H.P Lovecraft.


Des coups répétés à la porte retentirent dans toute la maison, l’écho remontant doucement vers le premier étage, réveillant en sursaut la jeune fille. Il lui fallut un moment pour comprendre où elle se trouvait, pour s’habituer à nouveau à ce tableau où se reflétait un lys qui lui renvoyait sa propre souillure. L’odeur des draps l’écœurait, la forçant à se lever pour se traîner vers la grande armoire de bois vernie, un peu ancienne, et ayant autrefois appartenu au garçon dont elle avait pris la place. Une vulgaire remplaçante, seulement là pour maintenir allumé le flambeau d’un souvenir qui n’avait plus que l’apparence d’une bougie. Tous les jours, elle voyait couler, visqueuse et malsaine, la cire du passé, obnubilant son nouveau père et sa nouvelle mère, la forçant, elle, à n’être qu’un personnage secondaire d’une pièce dont elle n’avait même pas à faire parti.
Cela faisait 8 ans que le garçon de ce couple sexagénaire était décédé dans un terrible accident de voiture qui l’avait emporté lui et sa petite amie alors que cette dernière le ramenait d’une soirée, avec quelques grammes en trop dans le sang. Un procès envers la famille de cette importunée plus tard, et voilà Papa et Maman habitant une nouvelle maison dans laquelle ils pleuraient, versant d’affreuses larmes de crocodiles, la mort de leur seul et unique amour.

Les coups se firent plus puissants derrière la porte et une voix nasillarde, correspondant à sa gentille nouvelle maman, la pria (lui ordonna plutôt) de se dépêcher d’aller ouvrir cette porte.

« C’est qui ? », demanda-t-elle de derrière le battant, bien que connaissant déjà l’identité de la personne.
« C’est le destin ! », lui répondit une voix féminine et légèrement ironique.
C’est avec un sarcasme similaire qu’Esther trouva intelligent de répondre :
« Ah ! Ca faisait longtemps que je t’attendais ! »

Et, sachant que son invitée ne partirait pas, elle consentit à ouvrir la porte. Une tornade blonde s’agrippa aussitôt à son cou, la poussant vers l’intérieur de la maison pour finir par la faire chuter contre un meuble. Deux grands bleus se hâtèrent de le fixer, malicieux, ayant l’air d’avoir déniché quelque chose d’extraordinaire.

« Ca y est ! Je sais tout ! Je sais ce qu’il se passe. J’ai la réponse à toutes tes questions ! »
« Pardon ? »
« Dépêche-toi ! »


Et Esther fut tirée de force hors de la maison.

Blonde comme les blés, de grands yeux bleus océans, 14 ans, tout comme Esther, Ely avait vite su percer le cœur renfrogné d’Esther pour la transformer en une joyeuse fille un peu timbrée. Cela faisait cinq longs mois qu’elle la fréquentait et elle sentait déjà déteindre sur elle la folie de cette jeune fille. Mais surtout, cela faisait cinq longs mois qu’elle refusait de révéler à Ely son passé et que cette dernière s’était persuadée avoir affaire à une amnésie passagère et s’était mise en quête de retrouver son passé. Ely représentait sa bouée de secours, son sauvetage in extremis des tréfonds de l’enfer dans lesquels elle était en train de s’embourber avant de la rencontrer. Sans Ely, Esther n’aurait jamais pu s’en sortir. Elle aurait sombré dans la démence, se serait attachée à une paranoïa extrême et n’aurait jamais pu voir le bout du tunnel, voir le bout de sa souffrance. Elle devait tout à Ely. Son sourire, son goût de vivre, son attachement pour les autres. Ely représentait son nouvel univers, son centre. Elle avait façonné toute sa vie autour de cette unique personne. Et, malgré le fait qu’un faux œil avait pu lui être implanté, masquant le trou béant, Esther s’appliquait à porter un cache-œil. Ce faux œil ne voyait pas. Il était juste là pour satisfaire une esthétique égoïste. Mais Ely trouvait son cache-œil amusant alors elle le portait, heureuse d’être acceptée.

Pourtant, ce fut à cette époque-là que la simple pègre locale, la mafia qui, jusqu’à présent, régissait dans l’ombre pour accomplir ses méfaits pris le pouvoir et embarqua la ville dans une série de meurtres et de carnages.

.


Elle courait. Plus vite que ses jambes ne pouvaient le lui permettre. Dans sa cage thoracique, son cœur s’emballait, cognant avec force contre sa poitrine, menaçant de s’arracher à son corps pour voltiger au milieu des ruelles. Derrière elle, elle laissait l’horreur et le chaos. Les larmes glissaient lentement le long de ses joues, emportées par le vent. Tout ça était un cauchemar, un horrible cauchemar. Mais elle s’en fichait.
Plus rien n’avait d’importance.
Les cris et les pleurs ne l’atteignaient pas, la souffrance des autres ne lui faisait rien. Elle avait perdu son seul espoir, la seule chose qui la maintenait envie et qui lui donnait l’impression d’être encore humaine. Maintenant qu’elle n’était plus là, qu’allait-elle devenir ? Qu’était-elle censée faire sans Ely ?
Le hurlement qui avait déchiré sa bouche n’était maintenant plus qu’un souvenir aux abords d’une psyché branlante et incertaine. Elle redoutait le moment où il lui faudrait affronter ses souvenirs, où il lui faudrait forger un rempart, une muraille autour de ces derniers pour les empêcher de venir laminer son esprit déjà en proie à la terreur et au doute.
Plus rien n’avait d’importance.

Ely était morte, prise entre deux feux. Elle se trouvait au mauvais endroit, au mauvais moment. Elle n’avait rien demandé à personne, elle n’était qu’une adolescente banale qui menait sa vie. Mais elle était le centre du monde pour Esther. Les balles avaient traversé son corps, déchirant ses organes et se plantant dans sa chair avec force. Elle avait vu son amie se figer sur place et lui intimer de courir avant de s’effondrer sur le sol, baignant dans son propre sang qui s’étalait à chaque seconde un peu plus autour d’elle, formant une flaque ingrate et écœurante. Et elle, elle s’était contentée de lui obéir, sachant d’ors et déjà qu’elle ne pouvait rien faire pour la sauver.
Au fur et à mesure qu’elle courait, elle fermait son cœur à tous sentiments, à toutes choses qui auraient pu lui procurer du plaisir. Elle vengerait Ely. Elle retrouverait quelle famille l’avait tuée et elle l’éradiquerait d’elle-même. La mafia méritait de payer pour ce qu’elle lui avait infligé.

.


Journaliste. C’était de loin le meilleur métier pour être au courant de tout ce qu’il se passait en ville. Elle pouvait ainsi s’informer, découvrir tous les secrets qui hantaient les familles de la mafia. Elle avait découvert avec le temps que la famille responsable de la mort d’Ely n’était pas celle qui dominait à présent la ville, mais était de celles qui se regroupaient contre Le Parrain actuel. Mais ça n’avait pas d’importance. La mafia devait disparaître. Pour le bien de tous. Elle informerait chaque famille, ne serait fidèle à personne et les mènerait à l’autodestruction.

And... you?


    Esther E. Aldisio, « I don't care. » Th_fru11
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Dimitri A. Visconti

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MessageSujet: Re: Esther E. Aldisio, « I don't care. »   Esther E. Aldisio, « I don't care. » Icon_minitime1Sam 29 Mai - 4:24

Je... défaille.
Ta fiche est magnifique, je suis en extase devant ton style, ton perso' [Chrome, en plus *o*] et puis toi quoi *o*

Fiche Validée avec beaucoup d'amour > Civils.
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Esther E. Aldisio, « I don't care. »

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